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05/01/2007
Mythologie sculptée
Jean-Baptiste sculptural, le doigt presque levé en une pose inspirée du célèbre Da Vinci domine souverainement une des salles du Rodin Museum de Philadelphie. Un baptiste hautain, assuré, homme de tête et va-nu-pied dont la nudité semble faire autorité – virilité du geste et de l'esprit tout autant que du corps. Il faudra au visiteur hésiter un peu avant de sortir du petit pavillon dédié à Rodin pour entrapercevoir, en son habituel plateau, le soleil cou coupé modelé par le sculpteur.
L'ombre de Salomé juste avant de partir, en un clin d'œil final comme tombé de rideau, voilà toute la danse tourbillonnant sans bruit. Jeu de voiles des pensées, pourquoi Rodin s'est-il refusé à sculpter les plis et les replis de la fille d'Hérodias ? Etait-ce que cette image déjà faisait cliché ? Qu'il fallait à Rodin repenser le mouvement et puis le recréer ? Les élèves du maître tels Jules Desbois n'hésiteront pas à tourmenter un peu les drapés des sept voiles pour donner l'illusion d'une vitesse instable, d'une femme presque toupie faisant tourner les têtes. Rodin préfère les mains coupées, les masques travaillés, révèle des corporalités toutes emplies de pensée, des corps qui sont des âmes, se refusant ainsi aux simples dichotomies. Or n'est-elle pas scission, séparation d'elle-même la danseuse célèbre en représentation ? Convulsions des martyrs, extase aussi des corps sur cette porte de l'Enfer, inscription de mouvements et chairs qui palpitent, c'est vers l'incarnation que veut tendre Rodin. Et Salomé tout en chair, révélant sous les voiles la blancheur de sa peau n'est rien sinon spectacle, sinon donnée à voir. La tête de Jean-Baptiste certes l'inscrit dans l'Histoire – mais ne l'incarne pas ; mythe ou le devenir d'une désincarnation.
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