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19/04/2005

La Salomé de Samain

medium_salome_romani.jpg "Hérode", extrait du recueil Symphonie héroïque d'Albert Samain.

Mortelle à voir, avec ses yeux diamantins,
Aux pourpres d'un couchant cruel, sous les portiques,
Hérodiade, au lent vertige des cantiques,
Ondule, monotone, en roulis serpentins.

Les colliers ruisselants bruissent, argentins.
Dans l'air ivre, gorgé d'encens asiatiques
Sa robe a des éclairs de gemmes frénétiques ;
Et voici s'écarter ses voiles clandestins.

Et le roi sent, frisson d'or en ses chairs funèbres,
La vipère Luxure enlacer ses vertèbres ;
Et, tendant ses vieux bras de métaux oppressés,

D'une bouche repue, incurablement triste,
Pendant qu'à terre gît le chef de Jean-Baptiste,
Il boit le sang qui brûle au bout des seins dressés,

Et l'irritante horreur des grands yeux révulsés.

08/04/2005

La Salomé de Milosz

Extrait du recueil Femmes et Fantômes

medium_salomecrane.jpeg — Jette cet or de deuil où tes lèvres touchèrent,
Dans le miroir du sang, le reflet de leur fleur
Mélodieuse et douce à blesser !
La vie d'un sage ne vaut pas, ma Salomé,
Ta danse d’Orient sauvage comme la chair,
Et ta bouche couleur de meurtre, et tes seins couleur de désert !
— Puis, secouant ta chevelure, dont les lumières
S’allongent vers mon coeur avec leurs têtes de lys rouges,
— Ta chevelure où la colère
Du soleil et des perles
Allume des lueurs d’épées —
Fais que ton rire ensanglanté sonne un glas de mépris,
Ô beauté de la Chair, toi qui marches drapée
Dans l’incendie aveugle et froid des pierreries !
Ton oeuvre est grande et je t’admire,
Car les yeux du Prophète, lacs de sang et de nuit
Où le fantôme de la tristesse se mire,
Comme l’automne en la rosée des fleurs gâtées
Et le déclin des jours dans les flaques de pluie,
Connaîtront, grâce à toi, la volupté d’Oubli !
— Ah! tournant vers ce front sinistre, que saccagent
Les torches mal éteintes de l’hallucination,
Tes yeux ensoleillés comme les fleurs sauvages
Et les flots de la mer poignardés de rayons,
Tu peux battre des mains, et le faire crier bien fort
Ton rire asiatique amoureux de la mort !
Car, les pensers d’orgueil et les pudeurs de vanité,
Qui tombèrent pour ta gaîté
Avec un bruit d’idole creuse et un râle de bijoux faux,
Ne valent, ni tes bras luisants et recourbés
Comme les glaives et les faux,
Ni tes cheveux amers et durs comme l’herbe brûlée,
Salomé, Salomé,
Glorieuse qui sus chasser
Le sarcoramphe noir Ennui du coeur d’Hérode,
Et qui fis en dansant l’aumône de la mort !
La sagesse mûrit pour la faim de la Terre,
Et toi tu vis ! et tu respires, ô Beauté,
Et ta chair réelle a des brises de santal
A la place où ta voix s’effeuille en accords rares,
Et le Monde s’abreuve à tes veines barbares
Où la pourpre charrie un délice brutal !

— Et nous qui connaissons la certitude unique,
Salomé des Instincts, nous te donnons nos coeurs
Aux battements plus forts que, les soirs de panique,
L’appel désespéré des airains de douleur,

Et nous voulons qu’au vent soulevé par ta robe
Et par ta chevelure éclaboussée de fleurs
Se déchire enfin la fumée
De l’Idéal et des Labeurs,

O Salomé de nos hontes, Salomé !

31/03/2005

La Salomé de Banville

Douzième sonnet du recueil "Les Princesses" medium_salomedolci.2.jpg

"Car elle était vraiment princesse: c'était la
reine de Judée, la femme d'Hérode, celle qui a
demandé la tête de Jean-Baptiste
."
Henri Heine, Atta Troll.

Ses yeux sont transparents comme l'eau du Jourdain.
Elle a de lourds colliers et des pendants d'oreilles;
Elle est plus douce à voir que le raisin des treilles,
Et la rose des bois a peur de son dédain.

Elle rit et folâtre avec un air badin,
Laissant de sa jeunesse éclater les merveilles.
Sa lèvre est écarlate, et ses dents sont pareilles
Pour la blancheur aux lys orgueilleux du jardin.

Voyez-la, voyez-la venir, la jeune reine!
Un petit page noir tient sa robe qui traîne
En flots voluptueux le long du corridor.

Sur ses doigts le rubis, le saphir, l'améthyste
Font resplendir leurs feux charmants: dans un plat d'or
Elle porte le chef sanglant de Jean-Baptiste.

16/03/2005

Le Jean-Baptiste de Mallarmé

medium_lucien_levy-dhurmer.jpg medium_s_f_salome.jpgLe soleil que sa halte
Surnaturelle exalte
Aussitôt redescend
Incandescent

Je sens comme aux vertèbres
S'éployer des ténèbres
Toutes dans un frisson
À l'unisson

Et ma tête surgie
Solitaire vigie
Dans les vols triomphaux
De cette faux

Comme rupture franche
Plutôt refoule ou tranche
Les anciens désaccords
Avec le corps

Qu'elle de jeûnes ivre
S'opiniâtre à suivre
En quelque bond hagard
Son pur regard

Là-haut où la froidure
Éternelle n'endure
Que vous le surpassiez
Tous ô glaciers

Mais selon un baptème
Illuminée au même
Principe qui m'élut
Penche un salut.

10/03/2005

La Salomé d'Apollinaire

medium_salomemom.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour que sourie encore une fois Jean-Baptiste
Sire je danserais mieux que les séraphins
Ma mère dites-moi pourquoi vous êtes triste
En robe de comtesse à côté du Dauphin

Mon cœur battait battait très fort à sa parole
Quand je dansais dans le fenouil en écoutant
Et je brodais des lys sur une banderole
Destinée à flotter au bout de son bâton

Et pour qui voulez-vous qu'à présent je la brode
Son bâton refleurit sur les bords du Jourdain
Et tous les lys quand vos soldats ô roi Hérode
L'emmenèrent se sont flétris dans mon jardin

Venez tous avec moi là-bas sous les quinconces
Ne pleure pas ô joli fou du roi
Prends cette tête au lieu de ta marotte et danse
N'y touchez pas son front ma mère est déjà froid

Sire marchez devant trabants marchez derrière
Nous creuserons un trou et l'y enterrerons
Nous planterons des fleurs et danserons en rond
Jusqu'à l'heure où j'aurai perdu ma jarretière
Le roi sa tabatière
L'infante son rosaire
Le curé son bréviaire