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13/12/2010

"Salomé triomphante"

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Quand ce carnet virtuel fut commencé vers 2005, en un temps où les blogs littéraires, pailletés de "nouveau", vivaient encore leur belle heure de gloire et qu’obsessionnellement, presque chaque jour, je retissais ce mythe, il y avait encore relativement peu d’images et quasiment pas de vidéos salomesques en ligne. Aussi ne pensais-je pas que l’œuvre d’accumulation serait par trop titanesque. Or, depuis quelques années, si j’ai souvent Salomé à l’esprit, je n’ose plus  guère transformer en notes mes pensées et l’àquoibonisme tend à m’éloigner de cette page. Mais après tout, n’ai-je pas décidé de m’occuper d’un numéro spécial des Oscholars sur le mythe de Salomé en 2011-2012 ? Ne vais-je pas dès janvier parler au MLA de jeunes femmes fatales ? Dès que le nom liquide de Lolita pointe le bout de son nez en hasard objectif, j’ai des envies d’écrits. Et puis tout à l’heure, sur un blog qui joue photographiquement (souvent avec brio) d’une époque qui m’intéresse autant picturalement que textuellement, d'une ère sur laquelle j’ai tant plaisir à travailler, le rouge sang m’a rappelée ici. Alors soit, reprenons.  

04/09/2009

Judith en Salomé

La célèbre analyse d’Erwin Panofsky (dont on trouvera trace par ici) revient à supposer que la connaissance du peintre, de ses habitudes et de son milieu offre à l’amateur d’art féru de textes bibliques et expert en mythologie un fil directeur. Ou plutôt, il s’agit là d’une structure, d’un docte cadre où serait à même de s’inscrire l’implacable logique d’un détective esthète. Et de fait, la quête du titre du tableau n’est autre qu’une enquête : Judith ou Salomé, il faut savoir trancher.

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Mais ne pourrait-on pas tenter d’éviter l’écueil d’une analyse qui ne serait qu’historiographie ? Conclure en effet que la clef de l’énigme se trouve très objectivement au cœur des us et coutumes de l’artiste et de son école, c’est faire peu de cas de la subjectivité du spectateur et supposer qu’il faille nécessairement accumuler un savoir d’historien de l’art, avant que de pouvoir apprécier esthétiquement la portée d’une œuvre picturale.

Essayons alors d’oublier un instant l’époque et ce que nous savons du peintre pour revenir aux deux figures bibliques de Judith et de Salomé. Comme Panofsky, ce sont essentiellement la tête en son plateau et l’épée qui attirent notre regard. Soulignons l’absence d’ancillaire jeune femme qui aurait pu avoir aidé Judith, tandis que les sombres figures masculines nous donnent à penser que les gardes ont confié leur sabre mortifère à celle qui voulait la tête du Baptiste. Des stigmates poivres et sel dans la barbe (voire des plis douloureux sur le front fatigué), on ne saurait conclure qu’il s’agit d’Holopherne car l’âge de Jean-Baptiste n’est pas non plus certain ; reste que tête, il y a ! Et subjectivement, si l’on conclue ici sur le nom de « Judith » c’est que l’on fait du pourpre éclatant de l’étoffe au premier plan à droite l’esquisse repliée du sac de tissu – dérobé dans la robe – où se dissimulera le fatal trophée. D’ailleurs est suggéré un léger déhanché, un souple pli du bras glissant vers le côté pour que chute, il y ait.

 

16/04/2008

Salomé électrique I: le serpent à deux têtes.

Elle était rondelette, replètement petite, toujours mal habillée, portait de sempiternelles lunettes d’institutrice – mais après tout, seule comptait La Fuller qu’elle devenait sur scène. Sur un coup de tête, Loie âgée de trente ans avait décidé de tenter sa chance à Paris et traversa l’Atlantique, sa vieille mère dans les bagages.

Paris, toujours Paris et puis Loie fila, en fiacre, aux Folies.

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Serpentesque découverte, immense déception: cette danse de volutes fluides et virevoltantes inventée par Loie dès 1891 pour les planches new yorkaises, était, à l’affiche, déjà attribuée à une compatriote, plagiaire de génie. Il fallut à la danseuse auditionnant le jour-même se réapproprier cette contrefaçon, faire sienne de nouveau une chorégraphie qu’elle avait initiée; mais Édouard Marchand ne s’y trompa pas et, remerciant Maybelle Stewart la fausse serpentine, engagea celle qui ferait des Folies-Bergères le temple de l’Art-Déco.


A suivre


(NB: L’excellente et récente étude
« Electric Salome » de Rondha Garelick - en cours de lecture pour une revue d'ouvrage chez les Oscholars - est le point de départ de ces divagations autour de la figure de Loie Fuller)

13/03/2008

« mièvre et féroce »

Madame Daudet, lectrice de l’Hérodias de Flaubert: « Jamais cet épisode si connu de l’histoire juive était apparu avec cette magie de vérité et cette grâce mièvre et féroce que la danseuse Salomé, les lèvres et les sourcils peints, un carré de soie changeante aux épaules, les pieds chaussés de petites pantoufles en duvet de colibri, à demi romaine et barbare, communique à tout ce récit, le plus complet peut-être des trois contes » (Julia Daudet, Études Littéraires - initialement publié sous le pseudonyme Karl Steen, dans le Journal officiel du 12 juin 1877).

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Plus loin, la même sur Les Princesses de Banville « Ces sonnets ressemblent à des tapisseries anciennes, où sont tissées, dans un cadre tout orné d’attributs mêlés de feuillages exotiques, des nobles dames et des déesses. Chaque point a la saillie d’une perle; et pourtant les couleurs se fondent si bien, brillant si finement que les yeux des femmes, leurs mains roses resplendissent encore parmi ces magnificences qui leur prêtent seulement le feu d’un rayon, la caresse d’un reflet. Rien de plus lumineux, rien de plus doux » (Julia Daudet, Études Littéraires).

02/03/2008

« Une fois de plus »

Et lors la sixième est aveugle
Comme un pinson tout à chanter,
Et la sixième, elle, est aveugle
Car voici qu'on est à aimer,

Et que des mets sont sur des tables,
Et que du vin coule de nuit,
A bougies brûlant sur des tables
Où sont des fleurs avec des fruits.

Or gestes alors qui se pressent,
Vins bus, paroles échangées,
Lèvres tendues, yeux qui se baissent,
Chair ici qui jette les dés.

C'est temps allé qui se dérobe,
Et la tête de Jean coupée
Qu'emporte saignante en sa robe
Une fois de plus Salomé,

Car la sixième, elle, est aveugle,
Comme un pinson tout à chanter,
Car la sixième, elle, est aveugle,
Et puis voici qu'on a aimé.

(Max Elskamp « La Vie » in Huit chansons reverdies.)

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19:55 Publié dans Voiles | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : elskamp, salomé, maud allan

14/01/2008

Matérialité du mythe

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Le mythe de Salomé est un mythe de l’élection et du choix. Pour qu’il y ait capitulation, décapitation, Jean-Baptiste doit avoir été fait chef – et l’adoubement du prophète, son ultime baptême est une noyade de l’esprit et de l'âme dans le sang, la mise en scène sacrificielle de sa tête se mirant non plus dans l’eau du Jourdain mais dans les reflets dorés et rougeâtres d’un rutilant plateau. L’auréole du saint se révèle ainsi tangible bien avant que d’être une figure de style. 

16:50 Publié dans Trame | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Salomé, Jean-Baptiste, mythe

23/12/2007

« Le refus de toute fissure »

« Salomé-Hérodiade : type du sujet par lui-même tellement vigoureux que, de Flaubert à Strauss, en passant par Wilde et Mallarmé il n’a engendré que des réussites (Et je me souviens encore de la Salomé  éblouissante qu’avait donnée il y a quelques années à la télévision Koralnik, dans le style pictural de Gustave Moreau). J’y songeais, en écoutant la Salomé de Richard Strauss, de très loin au dessus de tout ce que j’en attendais. Tout concourt dans un tel sujet à la fascination : le double éclairage crépusculaire d’une fin et d’un commencement de monde qui donne aux personnages, sur le bariolage des fonds baroques, la netteté de  silhouette des objets qu’éclaire le contre-jour, la double résonance des paroles qui vont se propageant simultanément dans deux espaces mentaux et historiques, comme si la prison souterraine du Baptiste dotait soudain le langage des résonnances d’une crypte à la sonorité majeure – la possibilité qu’a l’action aussi bien de se développer à volonté et de s’enrichir de scènes annexes que de se contracter en un seul tableau expressif (la danse de Salomé tout come l’Apparition de Gustave Moreau) . Ainsi la Salomé de Wilde et Strauss peut-elle réaliser ce qu’aucune tragédie classique n’a pu réussir tout à fait : une unité dramatique absolue dans le temps comme dans l’espace : rien que, dans un lieu unique, une scène continue d’une heure trois quarts, sans contraction, sans rupture, sans coupure aucune, sans une minute creuse.  L’envoûtement que je subissais en l’écoutant m’aidait à comprendre ce qui se cachait d’exigence vraie derrière la règle si absurde parce que maladroitement formulée des trois unités : l’exigence de l’absolue clôture de l’espace dramatique, le refus de toute fissure, de toute crevasse par où puisse pénétrer l’air extérieur, comme de tout temps de repos qui laisse place au recul pris. » 
(Julien Gracq, En lisant en écrivant)
 
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16:40 Publié dans Voiles | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : Julien Gracq, Salomé

14/08/2007

« Et l’ardeur aux fantômes »

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Salomé, vous avez les parfums et les baumes

Et les jardins royaux dans la pourpre des soirs,

Les étoffes, les fards, les gemmes, les miroirs,

Et les citernes d’eau, sonores sous leurs dômes !

 

Salomé, vous avez les danses. A vos paumes

On a peint des signes magiques, verts et noirs ;

Votre corps qui les guide à d’infâmes espoirs

Rend aux morts le désir et l’ardeur aux fantômes.

 

Alors pourquoi voulûtes-vous, ô Salomé,

Que du tronc nu, roulât le chef inanimé ?

Fût-ce afin que ce tût la voix âpre et farouche ?

 

Ou pour voir si, parjure à ses rêves divins,

Ne tressaillirait pas au feu de votre bouche

La tête aux yeux fermés qui saignait en vos mains ?

 

(Henri de Régnier)

 

02/08/2007

Lune décollée

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13:10 Publié dans Voiles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Oscar Wilde, Salomé

20/07/2007

Runaway Salomé

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(Pierre Louÿs)